B.3 Historical and Multicultural Perspectives on Research-Creation, Part 2
B.3 Perspectives historique et multiculturelle de la recherche-création, Partie 2
Wed Oct 20 / mer 20 oct / 11:30 – 13:00 PDT
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- Isabelle Pichet, Université du Québec à Trois-Rivières
- Cynthia I. Hammond, Concordia University
Whether we look to the humanist figures of the Italian Renaissance, the academicians of the Grand Siècle, conceptual artists of the second half of the twentieth century, or the cultural output of diverse Indigenous peoples worldwide, artists have long united creative undertakings with research, broadly defined. This approach, lately, has been named "research-creation." Although research-creation is generally viewed as an emerging field of practice, we would suggest that its characteristics position it within a discontinuous historical lineage, marked by interruptions and re-emergences rather than novelty, as much in traditional as in western societies. Throughout history, clues, fragments, and witnesses to this approach arise here and there; it is possible to find these traces in the artists' biographies, various literary sources, and of course, in works of art themselves.
Sous les figures de l'humaniste de la Renaissance italienne, de l'académicien du Grand Siècle ou encore des productions des diverses cultures des peuples autochtones à travers le monde, l'artiste a depuis longtemps uni sa pratique créatrice à une recherche réflexive dans le but de communiquer le sens de son travail. Cette démarche trouve sa forme présente sous l'expression relativement récente de « recherche-création ». Bien que pensée comme une approche émergente, les fondements de la recherche-création possèdent des constantes qui l'inscrivent dans un lignage historique discontinu, fait d'interruptions et de réémergences, tant dans les sociétés traditionnelles qu'Occidentales. Tout au long de l'histoire, des indices, des fragments ou des témoins de cette approche surgissent ici et là ; les artistes, les sources littéraires et les œuvres les ayant semés à travers leur parcours.
Isabelle Pichet est professeure associée à l'Université du Québec à Trois-Rivières depuis 2017 et commissaire d'expositions (P.-É. Borduas et O. Leduc). Ses recherches portent plus spécifiquement sur la question de l'histoire du public et des expositions publiques européennes aux 17e et 18e siècles. Elle a entre autres publié aux Éditions Hermann Le tapissier et les dispositifs discursifs au Salon (1750–1789) (2012), ainsi que Le Salon de l'Académie royale de peinture et sculpture (2014). Ses projets de recherche les plus récents, Le Corps sensoriel dans les expositions d'art au 18e siècle (CRSH/2018–20) et Aux sources de la recherche-création (CRSH/2020–22), proposent de nouvelles voies de recherche sur les Salons artistiques et l'Académie royale de Paris au 18e siècle, ainsi que sur la question de la recherche-création dans une perspective historique.
Cynthia Hammond is a Professor of Art History at Concordia University. She is an interdisciplinary artist and historian of the built environment. Presently she is the lead investigator for La Ville Extraordinaire, an oral history research-creation project that explores the urban knowledge of diverse older citizens (SSHRC PDG, 2020–23). Her research and creation focus on the relationships between women and built and biological landscapes. Cynthia has written many essays and one book on gender, urban memory, and research-creation as a tool for surfacing the exclusions of the built environment.
B.3.1 Aby Warburg's Mnemosyne Atlas (1927–29) as a Proto Research-Creation
Mehmet Sülek, University of Amsterdam
In the last three decades, Warburg has been haunting art history and beyond. Despite the growing literature on Warburg, scholars disagree about his scholarship and his last project Mnemosyne Atlas (1927–29). I argue that Warburg's scholarship can be understood if we can answer the question of why we need to talk about Warburg today. In this regard, this paper will claim that Warburg's Mnemosyne was an early example of research-creation, which makes it pertinent for contemporary scholarship.
The paper will first discuss the ways in which Mnemosyne transgresses the boundaries of academia and artistic practice. It will highlight how Warburg's formulation of Wanderstrassen der Kultur (pathways of culture) led him to construct cartography of images in which multiple spatial and temporal trajectories collide, and thus multiple narratives emerge. Following this line of thought, it will propose that Mnemosyne was not an end product but rather a process of thinking with image. Moreover, it will underline the importance of Thomas Carlyle's Sartor Resartus (1836) for Warburg throughout his life, which intermingles fiction with non-fiction. Secondly, it will demonstrate that Mnemosyne and contemporary research-creation share similar themes such as world-picturing (Smith, 2006), cultural memory, and temporality (Ross, 2012; Groom, 2013). In this regard, it will argue that both in Mnemosyne and contemporary research-creation images function as world-forming, time travel, and recollection. Thus, this paper aims to seek an answer to where Warburg's legacy can be found today and how the questions raised by Warburg can be found in contemporary research-creation.
Mehmet Sülek is currently a PhD Candidate in Art History at the University of Amsterdam. He holds a BA in Film Studies from Yeditepe University and a MA in History of Art (Distinction) from the University of Leeds. In his MA Dissertation, he analyzed 14th Istanbul Biennial (2015) as a Warburgian project. His PhD project concerns with the historiographic challenges caused by large-scale exhibitions that inhabit cities and the ways in which Warburg's methodology can provide a framework to overcome these challenges. In 2020, he co-founded PNSA Postgraduate Network for the Study of Art Historiography, which aims to organize readings groups, seminars, and annual conferences. He is also the co-organizer of the forthcoming Queering the Boundaries of Arts in the Sinosphere workshop, hosted by, Institute of Art History at the University of Zurich.
B.3.2 Recherche-création, pluriversalité, décolonialité
Édith-Anne Pageot, Université du Québec à Montréal
Cette communication porte sur des collectifs d'artistes, pluriculturel et plurilingue, qui travaillent au seuil des disciplines artistiques, scientifiques et environnementales. À partir d'une analyse historique et d'une réflexion théorique ancrée dans le paradigme décolonial, je problématiserai la recherche-création au sein des groupes Boréal Multimédia (1988–96) et Les Précambriens (1994–96) — un collectif, dont j'ai fait partie au moment de sa fondation. Il s'agit de voir comment la recherche-création au sein de ces groupes appréhende notre rapport au monde, conçoit notre façon d'être-ensemble, et façonne l'imaginaire géographique. Ces groupes multidisciplinaires furent fondés dans les Laurentides, au nord de Montréal par l'artiste canadien d'origine mexicaine et tepehuane Domingo Cisneros après la fermeture du Collège Manitou (un collège autochtone établi à La Macaza (1973–76) où il avait enseigné vingt ans plus tôt. Les initiatives extra-urbaines menées par ces collectifs émergent dans la foulée de mouvements d'art « écologique » au courant des années 1970 et 1980 et dans la mouvance des théories postcoloniales. Tour à tour, ces groupes furent les porteurs du projet «territoire culturel» un concept de Cisneros qui ambitionnait de créer un laboratoire artistique, social et scientifique en milieu naturel afin de participer à la résolution de problèmes sociaux et environnementaux, notamment la pauvreté en région.
Edith-Anne Pageot s'intéresse à l'historiographie, aux logiques interdisciplinaires, transculturelles et transnationales qui traversent les modes de production, d'exposition et de réception des objets d'art. Son plus récent projet de recherche, Une géographie des réseaux de production et de diffusion de la fibre dans l'art moderne et contemporain au Québec (FRQSC PAFARC 2021–24), participe des théories critiques des cadres normatifs, androcentrés et coloniaux, qui façonnent l'histoire de l'art canonique. Elle prépare actuellement une monographie portant sur La culture artistique et médiatique au Collège Manitou. Agentivité et stratégies d'autodétermination (CRSH PAFARC 2017–20). Edith-Anne Pageot est professeure Département d'histoire de l'art de l'UQAM depuis 2016, membre régulière de l'Institut de recherches et d'études féministes (IREF), et membre associée du Centre interuniversitaire d'études et de recherches autochtones (CIERA).
B.3.3 La théorie de Stanford Anderson et son potentiel pédagogique
Denis Bilodeau, Université de Montréal
Les débats contemporains entourant la définition de la recherche-création, en architecture comme en art visuel, peuvent en partie être compris dans le contexte de l’intégration de ces programmes au sein des universités, depuis les années 1960, et en rapport au désir des disciplines créatives d’accéder aux ressources des grands organismes subventionnaires et conseils de recherche en satisfaisant à leurs exigences de qualification scientifique.
Si le développement des recherches scientifiques spécialisées autour de questions techniques, historiques ou sociales a su s’imposer, certains chercheurs se sont aussi penchés sur la possibilité plus radicale, mais aussi plus problématique, de penser le processus de conception à la manière d’une démarche de recherche scientifique.
Ainsi, dans les années 1980, Stanford Anderson, directeur du programme de doctorat en histoire, théorie et critique de l’architecture au MIT, a exploré cette idée en se basant sur la théorie des « competing systems of research programs » élaborée par l’historien et épistémologue des sciences Imre Lakatos. Ainsi, selon Anderson, un programme de recherche en design serait construit autour d’un modèle conceptuel stable et d’un ensemble d’hypothèses évolutives ouvrant la voie à divers axes et séries d’expérimentations. Il utilise comme exemple, l’ensemble des villas conçues par le Corbusier dans les années 1920 à partir du modèle structural de la « maison domino » et des hypothèses formulée dans les « cinq points pour une architecture ».
Cette présentation analyse la contribution d’Anderson dans son contexte historique et elle s’interroge sur les limites et les possibilités ouvertes par cette théorie. Dans quelle mesure permet-elle non seulement d’analyser a posteriori une démarche de conception mais aussi de structurer un travail d’exploration et de création à venir? Quelles sont les implications de cette théorie pour la définition du travail de conception et de son rapport à l’histoire de la discipline et de la culture architecturale?
Denis Bilodeau / Études: B.Arch. Université Laval (Québec), MArts et MPhil. Histoire de l'art, Université Columbia, (New York), PhD Architecture, Université de technologie de Delft (Pays-Bas). Titre : Professeur titulaire, École d'architecture, Université de Montréal. Recherche et d'enseignement: Histoire, théorie, critique et pratique de l'architecture. Co-fondateur du Laboratoire d'étude de l'architecture potentielle à l'Université de Montréal en 2002. Commissaire de l'exposition Concours d'architecture et imaginaire territorial : les projets culturels au Québec : 1991–2005, présentée à Montréal, au Luxembourg et au Pavillon de l'Arsenal à Paris en 2007. Commissaire : Éric Gauthier : Architecture–Trame–Index, Maison de l'architecture du Québec Montréal (2010). Conférence récente: Jacques-François Blondel et l'enseignement de l'architecture. (Cité de l'architecture et du patrimoine, Paris (2017) (publication en préparation). Codirection de Fragments d'un discours architectural : la critique à l'œuvre. Éditions de La Villette (à venir en 2021).